95. Et toque!


Tout a commencé par une coupe de Champagne. Enfin une... deux. Un ami avait été invité par sa chargée de clientèle bancaire à suivre un Atelier de Chef avec l'invitée de son choix et j'étais le choix plus qu'heureux parce que quand il s'agit de manger faire la cuisine, je suis dans mon élément ! Mon propre conseiller bancaire m'ayant offert un porte-clés lors de l'ouverture de mon crédit immobilier, j'envisageais tout de même en mon for intérieur entre deux gressins la possibilité de changer d'établissement financier prochainement. Cette petite réflexion mise à part, la soirée s'annonçait plutôt bien. Moi qui me réjouissais de découvrir trucs et astuces de Chef pour sublimer mes carottes râpées, jusque là, je n'étais pas déçue! Avant cet atelier, il ne m'était encore jamais venu à l'idée d'ouvrir une bouteille de Ruinart avant de me mettre aux fourneaux. Quelle erreur! Pleins de bonne volonté, mon camarade et moi-même étions prêts à mettre immédiatement en pratique cette nouvelle technique en buvant une troisième coupe avant d'enfiler nos tabliers mais Cécile, notre Chef du soir, ne semblait pas de cet avis. A moins qu'elle n'ait jugé que nous n'ayons pas encore le niveau nécessaire? Nous l'avons donc écoutée nous  annoncer le déroulé de la soirée et le menu que nous allions réaliser : Ravioles de langoustines - Daurade en croûte d'herbe - Fondant chocolat, tuiles orangées et coulis de caramel, le tout en 1H30. Alors ça, ça m'a épatée parce que moi quand j'invite les copains, je mets rarement 90 minutes pour préparer un entrée-plat-dessert. Mais c'est vrai que, en y réfléchissant, je dois plutôt mal m'organiser parce que je fais tout moi-même et tout bien réfléchi, ce n'est pas très malin. Je fais les courses, je lave et trie herbes, fruits et légumes, je casse les œufs toute seule, je pèse mes ingrédients et puis je n'ai pas Juan pour faire la plonge chaque fois que je pose un cul de poule ou un économe dans l'évier. En plus je fais le ménage dans ma cuisine sinistrée et je mets la table pour mes invitée toute seule! Non, vraiment, quelle nouille! 
En tout cas, quand Cécile a ajouté qu'après, nous serions bien contents de bouffer tout ça  (oui, bon, elle l'a dit en plus joli), on l'a crue volontiers. Même avec ses cheveux rasés à moitié. Ensuite, nous nous sommes dirigés vers nos ilots rutilants et respectifs - certaines en clopinant sur leur béquilles parce que leur mollet n'était pas encore tout à fait remis même après un mois de plâtre - et c'était un peu bête parce qu'aussitôt on a dû retourner autour des pianos pour commencer par préparer les desserts et certaines ont un peu maudit Cécile qui nous faisait faire des allers/retours inutiles tout le temps. Bref, on a commencé la tambouille. Je vais vous épargner les recettes, caramel, tuiles et chocolat, vous connaissez la chanson. Ici c'est pas un blog de cuisine et si vous voulez connaître les secrets du Paris-Brest Déstructuré ou celui de la  Tarte au Citron Décitronnée regardez plutôt Top Chef
Ce qui est rigolo dans ces ateliers c'est surtout de se retrouver avec des gens qu'on ne connait pas, de toutes les banques, de tous les crédits, enfin bref de tous les âges,  qui cuisinent ou ... pas du tout ! 
En l’occurrence, nous étions 22. Un peu beaucoup pour cette pauvre Cécile il faut le dire. Faire la cuisine c'est sympa, mais avec l'équivalent de deux équipes de foot, ça devient du sport, forcément. 18 dames occupées à comparer leurs recettes de cuisine (dont une intolérante au gluten), 4 messieurs un peu paumés entre les marises et les écumoires, quelques élèves un peu dissipés (le Champagne sans doute) et... Chantal Ladesou. Enfin, pas la vraie. Son sosie. Disons une dame qui devait avoir le même coiffeur, le même tailleur et les mêmes bijoux. La voir désareter un filet daurade aura été une vraie source de joie!
A 22, on n'a pas l'occasion de beaucoup "faire" la cuisine (des selfies par contre...). On tripatouille un ou deux ingrédients chacun son tour et très poliment.
Morceaux choisis.
Cécile : "Nous allons maintenant faire le caramel..."
Monsieur 1 : "Voulez-vous chauffer le sucre pour le caramel?" 
Dame 1 : "Après vous j'ai déjà incorporé la crème..." 
Cécile : "Vous allez maintenant mettre l'appareil dans les moules..."
Dame 2 : "Si personne ne se dévoue, je verse dans le moules alors ?" 
Dame 3 : "Mais allez-y je vous en prie..."  
En même temps on se surveille du coin de l’œil... toujours le plus poliment du monde et le miel plein la bouche... 
Dame 4 : "Vous n'en avez pas mis assez il me semble...." 
Dame 5  : "Cécile n'a-t-elle pas dit aux 3/4? Vous n'êtes qu'aux 2/3..." 
Dame 6 : "Si j'étais vous je ne m'y prendrais pas de cette façon... mais évidemment chacun sa méthode..."  
Il est temps de passer aux ravioles et que chacun décortique sa langoustine. Chantal s'interroge, inquiète? Que fait-on de la tête? Cécile a l'air de perdre un peu la sienne, de tête, à force de devoir crier pour couvrir nos 22 voix qui piaillent au dessus des ilots. Elle en oublie le basilic et le poivre de Setchouan que nous avions pourtant consciencieusement (et joyeusement!) réduits au pilon pour la farce. Le fumet a du retard, Cécile opte pour la Maïzena (heureusement que Maman ne voit pas ça!) car nos daurades et leurs croûtes s'impatientent. A force des effluves qui embaument désormais la cuisine, nos estomacs aussi !
Les 22 commis que nous sommes, s'affairent. On hache, on cisèle, on fait un selfie, on fatigue, on émince, on julienne, on fait un selfie, on assaisonne, on dore, on croûte, on fait un selfie, on tombe, on grille...
Enfin, il est l'heure de mettre les pieds sous la table. Comme nous sommes fiers! On se réjouit. Eh! On l'a même pas mise, la table! Et c'est nous qui avons préparé tout ça! Ou presque. On se régale! Ou presque. Parce que le fumet Maïzena c'est définitivement pas ça. Je le dis en douce à la dame intolérante au gluten qui nous regarde sans manger. Histoire qu'elle n'ait pas de regret. C'est moi qui regrette. Je viens d'enclencher un flot inattendu. Figurez-vous que son mari aussi est intolérant. Au lactose. Ah la la, c'est pas facile pour faire les courses. Si vous saviez. Elle peut manger ci. Mais pas ça. Lui par contre... Ah oui? Mais c'est fou ça! Heureusement, Chantal Ladesou l'interrompt pour demander si elle peut garder son tablier. Perplexité générale. Cécile acquiesce, Chantal est aux anges! Un Monsieur, en profite pour faire un dernier selfie avec notre Chef du Soir....
Nous, on n'a plus faim, mais entre la Maïzena et le beurre (celui du caramel, du fondant chocolat et des tuiles), il n'y a pas de quoi s'étonner. On n'est pas devenu des chefs étoilés mais on a passé une chouette soirée. On se promet de refaire le menu du soir, pour le fun et les copains, à la maison et sans béquilles. 
Demain mon ami a rendez-vous avec sa chargée de clientèle bancaire. On devrait peut-être l'inviter quand on refera notre dîner? Après tout, on a découpé un poivron ensemble, ça crée des liens,. Et puis on ne sait jamais, si je voulais changer de financier, jeu de mots!

 
Daurade en croûte d'herbes et sa Tombée d'épinards aux poivrons






Plaquette de beurre déguisée en Fondant au chocolat avec ses Tuiles aux Oranges et son Coulis Caramel










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