145. Pas de panique, c'est la police !
Ce n'est pas que je m'ennuie mais je commence à trouver ça long... Il faut dire que côté ambiance, le commissariat du vingtième, ce n'est pas exactement le Pachacumba. Je dois cependant reconnaître que le personnel d'accueil est tout aussi aimable. C'est bien simple, j'ai cru que le brigadier planté à l'entrée allait me refuser l'entrée. Peut-être que ma tenue n'est pas adaptée aux critères de l'établissement ? Ou bien que je ne suis pas inscrite sur la liste des invités ? Je suis à deux doigts de glisser un billet de dix euros dans la main de Schwarzenegger quand il se décide finalement à me laisser entrer... Toute heureuse, je pénètre enfin dans le hall d'accueil, mais le décor et la playlist sont assez décevants. Je me dirige néanmoins d'un pas assuré vers le comptoir où je me retiens de justesse de commander un Mojito au policier de garde.
Derrière la paroi de plexiglas, ce charmant petit poulet a les cheveux d'un roux flamboyant. Il a, semble-t-il, également un fort penchant pour la musculation et un autre pour les tatouages maori. Pour ma part, comme je ne penche ni d'un côté ni de l'autre, je m'en tiens à l'objet de ma visite et lui explique poliment que suite au vol plus que regrettable de mon portefeuille, afin de pouvoir procéder au renouvellement de mes papiers d'identité contenus dans ledit portefeuille, je souhaiterais déposer une plainte. Le visage de mon petit poulet se fend d'un large sourire rassurant. Pas de problème. Il va de ce pas me rendre ce service, après tout il est là pour ça, il me suffit de lui fournir une pièce d'identité. Plaît-il ? Sans doute ai-je dû mal m'exprimer. Je reprends. On m'a dérobé le portefeuille qui contenait mes papiers, de facto, je n'ai plus de papiers. Cette information a dû mal à traverser la paroi de plexiglas. Mon policier est perplexe. Apparemment, il y a un problème et pas seulement de communication. Dans le doute, il préfère ne prendre aucune initiative et s'enfuit demander à son supérieur...
Voilà maintenant vingt-deux minutes que j'attends dans le couloir la décision de ce mystérieux supérieur. C'est à mon tour d'être perplexe et j'ai la très vague impression que je ne suis pas sortie de l'auberge du Sanglier Farceur. Le distributeur du hall ne proposant pas de Mojito, histoire de patienter, je me contente d'un expresso. Dégueulasse, cela va de soi. Mon policier est finalement de retour avec une bonne nouvelle, son supérieur l'a autorisé à prendre ma plainte. C'est tout juste s'il ne sort pas les confettis et les serpentins. Il m'invite à le suivre dans un box occupé par deux employées de la police nationale. Nous les interrompons alors qu'elles viennent tout juste de recevoir leurs nouveaux uniformes. Apparemment, la collection automne hiver 2022/2023 est un gros succès. Jess' a choisi le modèle à boutons (parce que les élastique, Audrey, ça grossit), en revanche, le polo n'est pas aussi près du corps qu'elle l'aurait souhaité, et un peu trop clair, le bleu ciel c'est salissant... Dommage. Eh oui, on rencontre bien des tourments quand on travaille dans les Forces de l'Ordre de nos jours !
Pendant que les reines du shopping déballent leurs nouveaux uniformes, j'ai commencé de déposer ma plainte. Mon petit poulet s'est lancé dans la transcription consciencieuse et soporifique du vol dont j'ai été la victime, malheureusement son clavier a beaucoup trop de touches et ses mains pas assez de doigts ! C'est ainsi que la rue de la Reynie devient la rue de l'Araignée... Que le Comédie Café est rebaptisé Café du Théâtre... Et que ma ville natale London se retrouve en Angleterre au lieu du Canada, parce que tout le monde sait ça. Je risque un trait d'humour... "Je vous montrerais bien mes papiers... " Le bide. J'assiste ensuite à un débat surréaliste entre mon policier et les reines du shopping : dans la mesure où il n'y a pas eu traction effective de mon sac à main y a-t-il eu, oui ou non, vol à la tire ? A deux votes contre un, le vol est finalement qualifié de vol simple. Après plus d'une heure passée dans ce box, ce n'est pas l'adjectif que j'aurais choisi.
Je paraphe enfin un compte-rendu d'infraction (deux exemplaires de quatre pages), un récépissé de déclaration (deux exemplaires de deux pages) et un questionnaire de satisfaction des services de police (deux exemplaires d'une page) avant d'être enfin libérée avec le sentiment d'avoir déboisé Fontainebleau.. Je quitte le commissariat deux heures et dix-huit minutes après y être entrée mais avec le Saint Graal : dix pages truffées de fautes d'orthographe qui me permettront de refaire mes papiers d'identité.
Il me tarde d'aller à la mairie...
Un nouveau spectacle pour le festival d'Avignon ou la trame d'une prochaine série télévisée ??
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